La Chine, un modèle de développement pour l’économie verte?
Par Tommaso Carnaroli
SHENZHEN, 30 mai – Le troisième Symposium des Lauréats du prix Nobel s’est tenu à Stockholm, en Suède, le 18 mai dernier, avec pour objectif de préparer un document qui sera présenté lors de la Conférence Mondiale sur l’environnement, qui, exactement 20 ans après ses débuts, aura lieu l’an prochain dans la ville l’ayant accueillie pour la première fois, à savoir Rio de Janeiro. Parmi des éminents participants à l’événement se trouvait l’ancienne Premier Ministre norvégienne Gro Harlem Brundtland, rendue célèbre pour avoir établi en 1987 la définition si souvent citée sur le développement durable « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». Dans une interview exclusive avec Xinhua en marge de l’événement du 18 mai, la Ministre (mandatée trois fois) et ancienne présidente de la Commission Mondiale sur l’Environnement et le Développement a félicité la Chine pour ses efforts en vue d’une économie plus verte, en disant que l’émergent géant asiatique représentait un exemple à suivre dans un monde qui a vu très peu d’améliorations sur la durabilité depuis le temps où elle dirigeait les travaux de la Commission.
« Je pense que le leadership en Chine sait que son modèle de développement ne peut pas se fonder sur le charbon, le pétrole, le transport en voiture privée si l’on veut pouvoir parler d’économie verte, car ils savent qu’ils ont des ressources énergétiques différentes. Ils doivent se servir de l’énergie solaire et ils sont en train d’entrer dans une aire de changement de toutes ces technologies ainsi que de leur mise en œuvre » a déclaré, Brundtland, en ajoutant que « les pays riches doivent changer le modèle, les nouvelles économies émergentes ne peuvent pas faire ce que nous avons fait car le monde suffoquerait sous la pression ».
Le même jour où Brundtland a mené son interview à Stockholm, un nouveau modèle de développement caractérisé par de faibles émissions de gaz à effet de serre était l’objet de discussions à plus de 8000 kilomètres de là, dans la ville méridionale chinoise de Shenzhen.
Lors d’un séminaire organisé par la Chambre de Commerce américaine dans le delta de la Rivière des Perles, les experts ont analysé les implications potentielles que pourrait engendrer la mise en œuvre des mesures pour la réduction de la pollution en Chine – en montrant comment un tel processus ne serait pas seulement vital pour le pays, mais aussi possiblement profitable à sa croissance économique. Un des nombreux mécanismes établis par le protocole de Kyoto afin de parvenir à une réduction mondiale des gaz à effet de serre est le soi-disant Mécanisme de Développement Propre (MDP), qui prévoit la création de projets hautement durables dans les pays en développement. De tels projets, s’ils fonctionnent efficacement, seraient susceptibles de donner lieu à des droits de pollution transférables, qui seraient revendus aux entreprises des pays occidentaux qui ont signé le traité (et ainsi être soumis à des restrictions strictes sur les niveaux d’émission de gaz). Avec 11 usines, la Chine maintient le plus grand nombre de ces projets, suivie de loin par l’Inde qui en compte cinq.
Par conséquent, les réflexions de Brundland se reflètent dans la réalité des faits : le géant asiatique, bien qu’il ne soit pas encore un signataire du protocole mentionné ci-dessus, accueille non seulement un grand nombre d’installations qui s’y rapportent, mais se prépare aussi à jouer le rôle de pionnier dans ce que la Harvard Business Review appelle la « grande tendance » de la durabilité.
Mise à part le fait que 78 pour cent de la production d’énergie du pays provienne encore d’un des agents énergétiques les plus polluants, le charbon, ces dernières années ont vu une augmentation de l’utilisation d’autres sources d’énergie, avec la géothermie en tête, couvrant 17 pour cent de la demande nationale. Bien que le solaire ne soit pas particulièrement développé, la Chine est désormais le plus grand producteur au monde de panneaux photovoltaïques et a récemment vu naître la construction d’usines de taille record, comme la nouvelle usine à Xuzhou dans la province du Jiangsu, qui est capable de produire 26 millions de kilowatts par heure – soit l’équivalent de 20,000 tonnes d’émission de carbone en moins par an.
A l’exception du nucléaire qui est aussi en pleine croissance, le directeur de SGS Chine, le Docteur William Lau, souligne le fait que la rapide croissance de l’énergie éolienne chinoise couvre désormais 23 pour cent de la production d’énergie de ce genre dans le monde entier. M. Lau suggère la possibilité pour le pays de couvrir ses besoins énergétiques à travers cette unique source d’ici 2030.
La politique de contrôle des naissances menée par le gouvernement a certainement joué un rôle important dans ces optimistes prévisions, ce qui a été un autre objet des éloges faites par l’ancienne Premier Ministre norvégienne lors du sommet de Stockholm un peu plus tôt ce mois-ci. De même, afin de rendre favorables les perspectives quant à la viabilité du pays, Brundtland a approuvé le contenu du douzième plan quinquennal rédigé récemment par la Chine, qui prévoit le progressif « verdissement » de cinq provinces et huit villes et qui établit aussi une économie à faible émission de carbone comme l’un de ses piliers.
La Chine possède toutes les qualifications pour dans le futur servir de modèle à d’autres pays souhaitant suivre le chemin du développement durable, et beaucoup dépendront de l’habileté du gouvernement à inculquer à ses citoyens – qu’ils soient consommateurs ou producteurs – une prise en compte plus grande du sujet. Dans tous les cas, la course vers une économie verte est en marche.
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